Secrétaire… Une histoire de femmes?

Les métiers d’écriture n’ont pas toujours été l’affaire des femmes. En fait, ceux-ci pourraient être considérés comme traditionnellement masculin puisqu’ils ont été occupés par des hommes pendant une plus grande proportion de l’Histoire et ce, à travers le monde.

Orient

Mésopotamie (4000-3500 AEC - Avant Ere Commune-) et Égypte ancienne (3100 AEC)

Les scribes étaient les professionnels de l’art de l’écriture. Ils devaient être d’excellents calligraphes et être compétents en arithmétique. Les jeunes hommes destinés à devenir fonctionnaires de l’État commençaient leur apprentissage avec leurs pères. Ils devaient apprendre le système d’écriture employé par ceux-ci et plus tard, étaient envoyés à l’école puis héritaient du poste paternel. Les scribes devaient rédiger des documents de toutes sortes. C’est à eux qu’on doit tout ce qu’on sait sur ces civilisations car c’était leur travail de noter, superviser et comptabiliser tout ce qui se passait au sein de l’État.

Chine ancienne (2000 AEC)

Le titre de scribe était, comme en Égypte, transmis de père en fils. Avant de devenir des professionnels, ces hommes de lettres devaient compléter 3 années de scolarité pour ensuite travailler comme novices. Les novices devaient perfectionner leur art avant de se spécialiser dans une sphère de leur métier telle que l’administration publique ou la loi. Pour se faire, ils travaillaient pour leurs gouvernements locaux et régionaux et ne jouissaient d’aucun rang officiel.

Israël ancien et moderne

La culture judaïque en étant une de tradition orale, les scribes étaient rares. Certains appartenaient au clergé alors que d’autres travaillaient dans un palais royal ou un centre administratif. Ce n’est qu’après l’apparition du Royaume d’Israël, vers le 9e siècle AEC, que des écoles de scribes commencent à faire leur apparition. La standardisation de l’alphabet hébraïque entre le 8e et le 6e siècle AEC a donné naissance à des règles strictes de pureté, de rédaction, de confection et d’exactitude auxquelles les scribes devaient se plier lorsqu’ils recopiaient la Torah et autres livres de la Bible Hébraïque.

Ces scribes, que les juifs appellent les sofer, sont des calligraphes renommés qui pratiquent encore aujourd’hui leur métier à la main. Ceux-ci produisent des copies de la Torah sur des parchemins. Cependant, cette discipline spécifique aux juifs, est maintenant pratiquée aussi par quelques femmes dont Jen Taylor Friedman (USA) et Emmeline Vicaire (France). Cette dernière est devenue, en juillet 2021, la première femme scribe, ou soferet, française.

Occident

Moyen âge

À partir du moyen âge, les clercs, notaires et secrétaires du Roi ont été les premiers fonctionnaires européens. Ces postes étaient occupés par des hommes issus de la noblesse. Vers la fin du 15e siècle, les hommes qui recevaient une charge de secrétaire du roi étaient anoblis, car un édit royal émit en 1484 faisait en sorte qu’il leur était nécessaire d’être nobles. Encore une fois, cette charge était réservée aux hommes et exigeait seulement qu’ils soient de religion catholique et qu’ils sachent lire et écrire.

Révolution industrielle

Ce n’est qu’à la toute fin du 19e siècle, lors de la révolution industrielle que le métier de secrétaire commence à se féminiser. En effet, pendant cette révolution, les besoins en main-d’œuvre sont grands et urgents. Avec l’apparition de la machine à écrire au début des années 1900, les femmes ayant appris le piano sont considérées comme étant prédisposée à exceller dans ce genre de poste. Avec le temps, le métier de dactylo devient à la mode. Les femmes occupant ces postes doivent être rapides et précises, car faire une faute ou oublier un mot signifie recommencer toute une page. Comme ces machines étaient complétement mécaniques, il n’existait aucun moyen de faire des corrections avec celles-ci.

Après la guerre…

Vers les années 50, la secrétaire se trouve à être idéalisée. Elle devient la maitresse de maison du bureau et son patron se l’approprie. Elle devient « sa » secrétaire car c’est un signe que son entreprise fonctionne bien s’il a les moyens de se payer ses services. Elle répond au téléphone, rédige rapports, comptes-rendus et correspondance. Tout ceci, bien souvent, en tapant 80-100 mots/minute sans que les marteaux de sa machine à écrire ne s’accrochent les uns aux autres.

De nos jours, la secrétaire est devenue l’adjointe et elle n’utilise plus le dactylographe mais plutôt son ordinateur. Son rôle s’est élargi et diversifié et elle est présente dans toutes les sphères d’activités. Si bien que plus de 90 % des postes d’adjointe, toutes catégories confondues, sont occupés par des femmes[2]. Ce métier est devenu si associé aux femmes que notre société moderne semble avoir oublié que ce travail, à l’origine, en était un d’homme.